Bonjour M. Elie Teumawe. Vous êtes le créateur de l’application « Docta » qui met en relation des patients et des médecins camerounais. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur vous et votre parcours ?
Je suis ingénieur des télécommunications, et je travaille depuis quelques années comme Project Manager dans le milieu bancaire et assurance à Paris.
Comment avez-vous eu l’idée de cette application ?
J’ai eu l’idée à la suite d’un séjour familial au Cameroun en 2014 où je suis tombé malade. Mon frère aîné m’a conseillé une clinique assez éloignée du domicile familiale et par la suite après analyse médicale, on a découvert que j’avais le paludisme. S’en est suivi 4 jours d’injections quotidiennes et je devais me rendre chaque jour à la clinique. Et à ce moment là, je me suis dit que j’aurai pu trouver un médecin ou une clinique à coté. Ensuite, après l’affaire Koumate, la jeune dame décédée avec ses deux enfants qui a provoqué une vive émotion, je me suis résolument engagé à développer l’application.
Docta se veut de révolutionner l’accès au soin dans notre pays
Quels sont les obstacles que vous avez eu à rencontrer lors de la concrétisation de « Docta » et comment avez-vous réussi à les surmonter ?
En réalité, je n’ai vraiment pas eu d’obstacles, car mener un projet jusqu’à la concrétisation, c’est mon métier au quotidien, je pense, à mon humble avis, que le plus dur reste à venir, les obstacles à venir sont nombreux, mais c’est normal car Docta se veut de révolutionner l’accès au soin dans notre pays, ce qui implique une modification des habitudes à la fois des patients que des médecins, ensuite fiabiliser le processus afin de les gens puissent faire confiance… Les défis à surmonter sont nombreux, mais nous y travaillons.
Pour vous, l’état des hôpitaux et la qualité des services hospitaliers ne sont-ils pas des aspects à améliorer avant de vouloir connecter les camerounais et des médecins ?
La réponse à la question ne peut et ne saurait être binaire, il est évident que l’état des hôpitaux est une vraie question, mais à mon humble avis pas l’essentiel, on a au Cameroun, une pénurie des médecins, des zones comme le l’Extrême-nord sont de vrais déserts médicaux et l’Est je crois. Ensuite les infrastructures, il y a encore des endroits au Cameroun où AVC égale mort faute de moyens (médecins et infrastructures) pour prendre en charge. Bien sûr, le seul fait de mettre en relation ne peut être l’apanage à tous ces problèmes, Mais Docta dans cet univers permet de donner la possibilité à chaque camerounais de bénéficier d’informations fiables et transparentes, 24H/24 pour trouver un médecin même en cas d’urgence et se donner une chance de sauver sa vie.
Comment être sûr qu’une fois mis en contact avec un médecin, le patient va être reçu et traité quand l’année dernière encore, nous avons été témoin de la triste affaire de Monique Koumate ? A votre avis, la mise en contact suffit-il uniquement ?
Docta va plus loin qu’une mise en relation simple, car nous mettons en place le suivi du patients après la consultation, le paiement en ligne ou différé qui sont autant de problèmes qu’avait rencontrés la défunte Monique, peut être faut-il rappeler que lors de la mise en relation sur l’application Docta, on a bien l’acceptation du médecin qui s’engage à prendre le patient en charge.
Êtes-vous en collaboration avec le ministère de la santé ou des institutions administratives de la santé au Cameroun ? Si non, le besoin s’en est-il ressenti ?
Il est clair que le besoin est même essentiel car ce sont des partenaires qui pourront nous orienter à identifier d’autres problèmes susceptibles d’être solutionnés grâce au numérique. Je me rends au Cameroun ces jours ci, justement pour poursuivre les échanges entamées.
Les médecins qui sont mis en contact avec des patients à travers votre application, n’ont-ils pas été réticents à cette idée au départ ? Comment avez-vous réussi à convaincre ceux qu’ils l’ont été ?
La plupart des médecins que j’ai rencontré personnellement m’ont assuré l’intérêt pour un outil de ce type, leur seule réticence reste liée à l’environnement pas assez mature pour des tels projets et des contraintes organisationnelles que nous nous efforçons à solutionner pour la prochaine version de l’application.
Peut-on retrouver dans votre appli des médecins disponibles sur l’ensemble du territoire camerounais ?
Oui, bien sûr car l’application est ouverte sur toute l’étendue du territoire nationale. Mais une campagne de communication sera lancée très prochainement pour informer tous les médecins sur l’utilité d’une telle application.
On parle de plus en plus de l’e-santé qui va reformer le système de santé dans son ensemble
A votre avis, quels sont les enjeux de l’utilisation des TIC dans le domaine de la santé actuellement au Cameroun ?
Les enjeux sont énormes, pas qu’au Cameroun mais dans le monde entier, on parle de plus en plus de l’e-santé qui va reformer le système de santé dans son ensemble. je veux pour exemple, l’utilisation des drones pour fournir des zones inaccessibles en matériels médicales (médicaments et autres) .
Pour terminer, quel message aimeriez-vous passer aux jeunes Camerounais qui nous lisent ?
Juste reprendre à mon compte cette citation de Richard Bach: Cessez de croire que vous ne savez pas jouer, laissez votre inconscient s’emparer de vos doigts, et jouez. En gros, ne pas avoir peur de se lancer et persévérer et ne pas abandonner ses rêves.
Réalisé par Kate Mouliom