Chair à canon des politiciens, la jeunesse pourtant oubliée dans les instances de décision au Sénégal

Les jeunes du Sénégal se mobilisent sur les réseaux sociaux avec Free Sénégal, y’ en marre comme dans les rues, dans leurs universités comme dans les instances de décisions, dans les parties traditionnelles ou dans les mouvements sociaux.

Un avant-projet de loi propose aux dirigeants politiques d’instituer un quota de 30% de jeunes de moins de 35 ans dans les instances de gouvernance au Sénégal. L’adaptation de cette proposition par les députés élus le 31 juillet dernier est un impératif. L’enjeu de cette meilleure présentation des jeunes-femmes et hommes  est primordial pour leur donner l’opportunité de contribuer pleinement à la définition des politiques publiques.

Les jeunes du Sénégal se mobilisent sur les réseaux sociaux avec Free Sénégal, y’ en marre comme dans les rues, dans leurs universités comme dans les instances de décisions, dans les parties traditionnelles ou dans les mouvements sociaux. Les jeunes sénégalais s’emparent des sujets politiques et sociaux en bouleversant les codes de mobilisation. Leur action est concrète et s’exprime à travers leur engagement associatif, les manifestations ou toutes autres formes de contestations populaires et politiques. Cet investissement n’est plus à prouver, il doit être reconnu et se concrétiser. 

Un espoir avait vu le jour en 2009, lorsque le Sénégal a ratifié la charte africaine de la jeunesse. Celle-ci garantit la promotion de la participation des jeunes à la société. Il serait temps que ces dispositions prennent tous leurs effets pour une démocratie réellement participative. 

Justement, les sénégalais ont élu, ce 31 juillet 2022, leurs représentant, qui ont été installés ce 12 septembre à l’assemblée nationale. Le processus électoral est censé garantir une représentativité équilibrée des différentes forces de la nation. On note toutefois que la représentation des jeunes reste largement négligée, et ce à tous les niveaux. Pourtant, l’âge moyen au Sénégal était de 19 ans en 2019, la moyenne de 35 ans constitue 75% de la population, selon l’ANSD tandis que les 18-35 ans représentent 27,5% de la population. Les personnes de 18 ans représentent la moitié de la population. Il y a donc un impératif à assurer la participation  formelle des jeunes, premier potentiel démocratique du pays. 

Néanmoins, les jeunes restent largement sous-représentés dans les différentes instances politiques. Sur 38 ministres, le nouveau gouvernement ne compte aucun jeune de moyen de 35 ans. Sur les 165 députés de la 13e législature sortante, seuls 5 avaient moins de 35 ans. Quant au conseil économique, social et environnemental, il ne compte qu’un seul jeune sur 120 membres. De plus, les jeunes ne figurent pas suffisamment dans l’actuel fichier électoral au Sénégal du fait de complexités dans les démarches administratives. Seulement 53,8 % des 18-25 ans sont inscrits sur les listes. Seuls 257.000 primo votants se sont inscrits lors des dernières opérations de révision du fichier en 2021, contre près de 400.000 en 2018. 

Cette place accessoire dans la sphère institutionnelle politique constitue un frein majeur à la prise en compte des aspirations et vision des jeunes. Les partis ou coalition en général placent les jeunes dans des positions marginales les rendant peu audibles et inéligibles. En reléguant les jeunesses à des sphères restreintes de l’action collective et politique, le pays se prive de contributions essentielles pour nourrir la démocratie et dessiner des politiques publiques transformatives. Par ailleurs, ce manque de représentation des jeunes participe à creuser les fossés générationnels.

Dans ce cadre,  le Réseau jeunesse et politique d’Afrique de l’ouest, et le consortium « Bruits de Tambours », composé de l’ONG RAES, du Réseau Siggil Jigeen de l’ONG 3D, d’Equipop, demandent :

L’ouverture des espaces de gouvernances aux jeunes pour qu’elles et ils soient impliqués dans la définition des programmes et politiques publiques et, notamment, celles qui les concernent ; 

-le renouvellement générationnel du paysage politique sénégalaise, très peu enclin au changement jusqu’à présent.

Cette meilleure représentation permettra aux jeunes de :

-promouvoir au sein des partis et institutions un regard alternatif sur les questions de société ;

-briser les codes traditionnels de l’action politique en réinventant les modes d’engagement civique et politique grâce à l’ingéniosité des jeunes et leur maîtrise des nouvelles formes d’expressions socio-politique ; 

-construire un cadre de concertation privilégié et élaborer des dispositifs tournés vers les jeunes, pouvant être promus à l’assemblée pour adoption ; favoriser l’émergence des jeunes leaders politique influents, établir un réseau d’influence pouvant impulser des changements politiques à tout instant.

Ces organisations citées  interpellent donc les nouveaux élus, les leaders de partis ou coalitions afin qu’elles et ils portent cet avant-projet de loi. Celui-ci consiste à instituer un quota de 30% de jeunes, dans le respect  , dans toutes les assemblées électives et semi-électives en vue de favoriser une meilleure participation institutionnelle des jeunes femmes et hommes.

Ibrahima Sow

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