A l’heure où être entrepreneur semble être la solution au chômage , nous nous sommes intéressés aux institutions camerounaises œuvrant pour les patrons du Cameroun Monsieur Protais Ayangma , Président de l’ECAM a accepté de répondre à nos questions
En ce début d’année, comment décririez-vous le marché économique du Cameroun ?
Je dirai que l’activité économique tourne au ralenti. Plusieurs entreprises notamment les PME connaissent de nombreuses difficultés dues non seulement à la conjoncture internationale mais également à la situation économique du Cameroun fortement contrariée par le non-paiement de la dette intérieure de l’État.
Quels sont selon vous les impacts du retrait de la CAN pour les PME, TPE, Camerounaises ?
je me limiterai à l’impact économico-financier. Sur le plan économique, un événement comme la Coupe d’Afrique est un véritable accélérateur qui a des effets vertueux incommensurables. Les touristes, les infrastructures tout le monde y gagne, de la vendeuse des beignets à l’industriel en passant par l’artisan, le chauffeur de taxi, le restaurateur, l’hôtelier… Les spécialistes estiment qu’un événement comme celui-là peut faire gagner à l’économie 2 à 3 points de croissance et c’est de la bonne croissance parce qu’elle est inclusive et concerne pour l’essentiel les produits locaux. C’est donc un gros manque à gagner pour l’économie toute entière et pour les opérateurs économiques, notamment les PME et les artisans.
L’impact financier est également important. Beaucoup de personnes se sont endettées pour s’équiper et/ou constituer des stocks en espérant rembourser ces dettes avec les rentrées de la CAN. Elles vont devoir faire face à des banquiers intraitables et beaucoup d’entre elles risquent la faillite. L’État devrait faire quelque chose parce que c’est un cas de force majeure.
Autre conséquence : les emplois escomptés même s’ils étaient temporaires, vont également manquer à l’appel.
Le climat socio politique actuel est il favorable à l’économie ? pourquoi ?
là encore, je me limiterai aux conséquences purement économiques. L’insécurité sous toutes les formes, est l’ennemie n°1 de l’économie. Celle-ci exerce un effet repoussoir sur les investisseurs, y compris nationaux et entraîne toute l’économie dans une spirale vicieuse : croissance ralentie, augmentation de la pauvreté…
L’insécurité sous toutes les formes, est l’ennemie n°1 de l’économie. Celle-ci exerce un effet repoussoir sur les investisseurs, y compris nationaux et entraîne toute l’économie dans une spirale vicieuse : croissance ralentie, augmentation de la pauvreté…
Vous êtes un spécialiste des assurances mais également le président fondateur d’ECAM le premier Mouvement Patronal Camerounais dédié à la défense des intérêts des Petites et Moyennes Entreprises. Ce mouvement a été fondée en 2011 comment avez détecté la nécessite d’une telle institution ?
j’ai un long vécu dans les organisations patronales. J’ai constaté que celles des entreprises qui avaient le plus besoin d’encadrement, de soutien, d’accompagnement étaient abandonnées à elles-mêmes. Nous avons donc décidé d’investir dans ce champ qui en réalité constitue l’économie réelle de notre pays et occupe l’immense population des acteurs de l’économie.
Ma culture assurantielle m’y a peut-être aidé car le grand principe de l’assurance est la mutualité et la solidarité
Quelles sont vos missions ?
ECAM s’est donné 3 principales missions :
- organiser et regrouper les PME, TPE et Start-up
- informer et former ses membres afin de les rendre plus compétitifs
- s’engager pour influencer et contribuer à créer un écosystème favorable à la PME
L’une de vos missions est de « Former l’entrepreneur en lui faisant bénéficier des appels à Projets, et des financements alternatifs. » comment détectez-vous les entrepreneurs ? est ce à lui de se rapprocher de vous ? est destiné à tous les secteurs d’activité ? Racontez nous
Notre mouvement est ouvert à tous les entrepreneurs, quelque soit leur secteur d’activité, leur sexe ou leur âge. Nous ciblons particulièrement les nationaux, les jeunes, les femmes et la diaspora. Il suffit d’adhérer à notre vision et d’accepter de payer le droit d’adhésion et sa cotisation. Certains se rapprochent de nous spontanément car nous commençons à être connus. Nous prospectons d’autres comme toute organisation soucieuse de son développement.
En 2017 Kiro’o Games porté par Olivier Madiba lance Kiro’o Rebuntu ? connaissez-vous ce programme ou son porteur ?
oui je connais bien Kiro’o Games et son promoteur. J’ai fait partie du jury Total Start-up Challenge qui l’a détecté et j’ai eu par la suite à le suivre.
C’est un garçon de grand talent qui ferait encore plus et mieux s’il était accompagné.
Dans le volet entrepreneur de l’ECAM peut on envisager dans les prochains jours une collaboration entre l’ECAM et Kiro’o Rebuntu ?
Nous sommes bien entendus ouverts à toute collaboration et agissons dans la mesure de nos possibilités. Il faudra bien évidemment déterminer quelles sont les attentes de Kiro’o Rebuntu vis-à-vis de notre mouvement patronal. À ce moment-là nous pourrons fixer le cadre de notre collaboration. L’entrepreneuriat jeune et le développement de la TPE fait partie de l’un de nos domaines d’activités stratégiques.
Existe-t-il aujourd’hui pour chaque secteur d’activité des institutions fédératrices qui permettent d’en recenser les acteurs, les données statistiques économiques aussi bien du jeune entrepreneur à la grande entreprise ?
l’Institut National de la Statistique (INS) fait déjà un travail non négligeable en matière de statistiques ; quoique ces dernières ne soient pas toujours disponibles à temps. D’autres entités comme la chambre de commerce, les mouvements patronaux tels que le GICAM ou ECAM, les associations sectorielles ont des bases de données qui peuvent être utilement consultées.
Un jeune entrepreneur a tweeté ceci le 26 janvier 19
« le problème avec la jeunesse de ce pays c’est que ceux qui rêvent grand n’ont souvent pas les moyens de réaliser leur rêves et ceux qui ont les moyens de les réaliser ne rêvent pas grand en général »
Que pensez vous de cette déclaration ?
Comme toute formule lapidaire, elle est évidemment réductrice. Ni tout à fait juste, ni tout à fait fausse. Il ne suffit pas de rêver grand et d’avoir de grands moyens pour réussir. C’est un peu plus complexe que cela. Il faut au-delà du rêve, beaucoup beaucoup de travail, beaucoup de persévérance et un peu de chance pour réussir. S’Il y avait une formule magique, ça se saurait. La jeunesse de ce pays a du talent, de l’audace. Elle a besoin d’être accompagnée. Faute d’accompagnement, elle doit apprendre à s’organiser, à être solidaire.
Quelles sont les mesures mises en place par ECAM pour les jeunes entrepreneurs ?
Nous avons lancé depuis 2015, le grand prix de l’innovation qui permet de détecter et primer les entrepreneurs innovants. Avec des partenaires, nous permettons à ces jeunes entrepreneurs d’avoir des primes, du coaching pour leurs projets. Nous mettons également à la disposition des start-up, un espace de travail dans notre co-working space afin de leur permettre de travailler dans un environnement professionnel.
Avez-vous un message pour la jeunesse ?
Oui, un message d’espoir et d’encouragement. Rien ne leur est donné, bien au contraire. Ils doivent donc travailler dur, très dur, beaucoup plus que leurs aînés. Faire preuve de patience, ne pas céder au découragement et surtout ne pas emprunter les chemins de la facilité… La fable de La Fontaine « Le laboureur et ses enfants » est à cet égard très inspirant.
Réalisée par Catherine Assogo