DJIN AYISSI:  » Il faut côtoyer les bonnes personnes… »

Dossier mode (partie 1)

Certains le voit comme la relève de la mode camerounaise mais l’étoile filante va à pas de tortue histoire de s’assurer un parcours des plus brillants. Du crayon aux ciseaux, il n’y avait que de la curiosité. Sa force se nourrit de ses faiblesses et sa créativité de ses origines. Nous avons rencontré Djin Ayissi, designer et directeur artistique, il a créé en 2020 Moan Yesus, l’une des marques les plus en vue du moment.

Djin Ayissi

Peux-tu te présenter à nos lecteurs et nous dire d’où tu pars pour la mode?

Je suis Djin Ayissi, titulaire d’un master en science et gestion de IUCSJD (Institut Universitaire Catholique Saint Jérôme de Douala). Après mon diplôme, j’ai tout de suite baigné dans l’univers du showbiz. Ma première expérience a été avec Universal Africa qui ouvrait une succursale ici et j’étais chargé de communication et d’autres projets artistiques.

Concernant ma passion, c’est depuis que j’ai 4 ans que je dessine, je faisais des portraits et en regardant les fashion show à la télé et les créations de nombreux designers internationaux (Iman Ayissi particulièrement m’a beaucoup inspiré). J’avais participé à un concours d’art et gagné le prix talent de l’UCAC St-jérôme grâce à un tableau que j’avais peint représentant l’Afrique. Comme lot, j’avais droit à une formation gratuite en art plastique à la maison de couture Jeman. Une fois là-bas, je me pique de curiosité pour les designers que je voyais tous les jours exercer et je me dis que je pourrais essayer. C’est la bas que j’ai tout appris, moi qui ne savait même pas comment monter un patron. C’est de là que tout est parti.

Créations de Djin Ayissi

Parle-nous de Moan Yesus

En langue Beti, Moan Yesus (traduction littérale) veut dire beauté divine. L’objectif c’est que tout le monde se sente comme un Dieu dans nos tenues. A l’école j’étais beaucoup raillé parce que “efféminé” et celà me mettait mal. J’ai une Tata qui, pour me redonner le moral quand ça n’allait pas, m’appelait Moan Yesus de façon affectueuse et ça me redonnait confiance en moi. C’est cette même confiance que je souhaite transmettre au travers de ma marque.
A long c’est de faire de Moan Yesus une marque de choix à l’internationale pour tous (qu’on soit skinny ou ronde,etc.)

En peu de temps, tu as réussi à te frayer un chemin dans l’univers très élitiste de la mode au Cameroun. Qu’est-ce qui, selon toi, t’as facilité l’accès à cet univers?

Je pense qu’il faut côtoyer les bonnes personnes, être à des évènements ciblés, être avenant et avoir une bonne image. Honnêtement, je n’irais pas jusqu’à dire que je suis déjà au top mais si j’ai pu faire ce bout de chemin, c’est en restant moi-même, en étant honnête, loyal, déterminé et audacieux. J’ai connu le refus mais j’ai aussi eu la chance d’avoir des personnes qui m’ont tendu la main.

Dylane Comédie & Nabila Rod en Moan Yesus lors des canal d’or act 13

Comment as-tu eu ton premier client?

C’était avant la création officielle de ma marque, j’avais fait des kimonos puis un shooting que j’avais posté sur les réseaux sociaux et de façon hasardeuse, j’avais remarqué que ça plaisait aux gens. À l’époque, je n’avais pas de modèle économique donc je n’avais pas fait de pricing pour mes créations, la première personne à m’écrire pour l’achat j’avais donné un prix de façon hasardeuse et elle a effectué l’achat.

Moan Yesus est une PME, comment arrives-tu à vendre et à faire du chiffre quand on sait que la classe moyenne a un pouvoir d’achat très limité? Arrives-tu aujourd’hui à vivre pleinement de Moan Yesus? Au départ c’était vraiment difficile parce que j’avais les process, je me lançais à l’eau et je n’avais pas vraiment de profit. Par la suite les choses se sont stabilisées avec un flux assez conséquent au niveau des ventes ce qui fait qu’aujourd’hui, j’arrive à vivre pleinement de Moan Yesus bien que ce n’est pas encore mon idéal. Aujourd’hui je suis principalement dans la vente en ligne, et bien que mes collaborations crédibilisant mon activité, notre environnement privilégie encore le contact physique, certains clients restent sceptiques.

Miss Cameroun 2023 en Moan Yesus

Qui sont tes principaux clients et par quel canal les drive tu?

La majorité de mes clients sont des working girls, amoureuses du lifestyle et passionnées de modes entre 20 et 60 ans. Elles nous retrouvent principalement par le biais des réseaux sociaux mais aussi lors des évènements auxquels nous participons et enfin, le bouche-à-oreille.

Le secteur de la mode est encore très balbutiant dans notre société. Que faut-il,selon toi, pour que ce secteur éclore?

Dans un premier temps l’éducation. Il y a beaucoup de parents encore aujourd’hui que les modèles de réussites n’incluent pas les artistes et les créateurs de modes pourtant l’art est un secteur qui génère beaucoup d’argent. Ensuite, les acteurs de ce domaine doivent donner de la valeur à ce qu’ils font; ne pas baisser leurs standards et exiger un traitement à la hauteur de ce qu’ils apportent. Et enfin, il faudrait que dans notre environnement, qu’on fasse preuve d’objectivité. Il faudrait que les affinités passent après le talent et l’intérêt commun.

Nadia Ed

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