NDA CHI: “Le Lessa Groove c’est vivre la nostalgie du passé dans le temps présent au travers des sonorités”

Nda Chi “seulement Dieu”, c’est le nom qu’a choisi Armand Noel Ntougchi Kamtchoua. Il se retrouve sous les feux des projecteurs en 2019 en remportant le concours de musique Mutzik Star où il fait sensation. Très attendu du public, il va enchaîner les projets dès fin 2020 dont le plus  retentissant est le titre NdaChi. Dans ces clips comme lors de ses spectacles, dans les sonorités aussi bien que dans les paroles, il défend la tradition, appelle à un retour aux sources, valorise la culture afro-descente, plaide pour les femmes et vante l’amour. Mais au-delà de tout, il se veut porteur d’une mission et d’une vision, celui du Lessa Groove,  un rythme dont il est pionnier et qu’il défend parfois, au péril de sa carrière, mais qui porte tous ses espoirs, sa force et sa passion. Nous sommes allés à la rencontre de Nda Chi, il nous parle de Lessa Groove, de  ses récents projets, de sa nouvelle médaille d’or gagnée  aux 9è jeux de la francophonie dans la catégorie musique, de l’avenir mais surtout de lui.

“Un mouvement qui parle aux afro-descendants”

Pourquoi la musique traditionnelle quand on sait qu’il est rare d’atteindre certains sommets avec ces sonorités? 

Je suis un artiste et l’artiste a une vocation. Je veux laisser quelque chose, transmettre un message et partager l’appel que j’ai reçu parce que c’est ma mission. Si le maximum de personne se montre sensible à ma musique, mon message j’en serais ravie mais si ce n’est qu’une poignée de personnes, je n’en serais pas moins heureux. Je ne vais faire de la musique pour plaire aux gens ou être “star”. J’ai baigné dans les sonorités traditionnelles depuis mon enfance et j’ai toujours été très sensible et plus réactif à ces rythmes qu’aux autres. Je considère donc mon don comme appel et le plus important c’est de délivrer le message qui me fait vibrer et ce n’est qu’au travers de cette musique là.

La musique fusion, ce n’est pas ce que l’on voit tous les jours ici au Cameroun. Parle-nous du Lessa Groove dont tu es pionnier. Comment arrives tu à t’en sortir depuis les studios ?

Le Lessa est une danse et le nom d’une société secrète à l’Ouest Cameroun.C’est une danse qui était exécuté lors de rites de passages d’hommes particulièrement à Baleng mais c’est l’un des rythmes les plus populaires de l’Ouest (5 départements sur 7 le pratiquent)qui, selon l’histoire, aurait été créé par le grand frère de Nchare Yen qui s’était démarqué de la culture Bamoun et aurait été inspiré par Dieu. Lessa désigne également tous les rythmes,les sonorités délaissées, ceux qui ne sont pas mainstream et assez valorisés.

Le Groove désigne tous les courants afro-descents et afro-centrés. J’aime souvent à dire que je fais de la musique Noir (sans être raciste) parce que je me considère (ma  musique) foncièrement afro-centré, le punk; rock; soul; black gospel; etc.qui sont des rythmes de cette époque. Donc pour résumer, je fais la musique de mes ancêtres certes mais je la joue dans mon temps, je m’inspire de la musique ancestrale que j’accorde avec les sonorités actuelles et c’est ce qui donne le Lessa Groove.

Au studio ce n’est pas toujours évident, on ne comprend pas toujours mes besoins  , mes attentes et ma vision. Mais une fois de, je suis convaincu de mon appel et je reste fidèle à ma vision et à ma mission.

 L’objectif c’est d’arriver à créer un style et un rythme particulier ou tu es juste dans un mélange de sonorité selon ton mood?

 On a tellement de rythme sous-cotés et dont certains meurent. Par exemple au Centre Cameroun on a le Lozilla et le Nieng qui sont rythmés qui se meurent et dans toutes les communautés afro-descentes, nous avons un héritage musical à sauver et à sauvegarder. L’objectif est de créer ce rythme dans lequel, les gens pour le Lessa ne concernent pas le rythme de mon village. L’objectif est de créer un mouvement qui va parler, d’abord à tous les afro-descendantes et au monde. Le Lessa désigne toutes les sonorités afro-descendantes qui souhaitent vivre la nostalgie du passé dans le temps présent au travers des sonorités. 

“Un parcours de combattant”

De la musique à la danse en passant par le mannequinat, quelle casquette tu arbores le mieux?

Toutes s’harmonisent pour donner Nda Chi que l’on connaît et aime. J’ai commencé avec la musique, puis j’ai pris des cours de danse et le mannequinat apporte aussi son charme parce que je valorise mieux les tenus de scènes grâce à ce côté. Toutes  ces casquettes définissent qui je suis et me permettent de mieux m’exprimer et de me démarquer.

5 ans après mutzig star, qu’est ce que tu aimerais pouvoir refaire ou améliorer depuis ta victoire à ce concours? Que retiens-tu de ton parcours jusqu’ici?

Très honnêtement, je ne  sais pas. Je trouve que chaque jour est mieux qu’ hier et j’apprends chaque jour. Ce que j’ai trouvé dommage avec Musik Star c’est que ma victoire a coïncidé avec la Covid-19. Le concours m’avait propulsé mais  malheureusement, je n’avais pas assez tourné, vu les restrictions et autres pour le solidifier. J’ai dû batailler pour revenir au devant de la scène et grâce à Dieu, chaque jour,on évolue un peu plus. 

De mon parcours  jusqu’ici, je retiens que j’ai fait les bons choix, j’ai persévéré pour ma vision. J’ai eu des propositions de contrats alléchantes mais malheureusement me demandaient de renoncer à mon moi véritable et jusqu’ici, je suis satisfait de mes choix. Mon parcours est semblable à celui d’un combattant. 

Reconnaissance

 Parle-nous de ton nouveau projet “Toi”

Toi est une chanson de reconnaissance à l’endroit de ceux qui nous aident chaque jour, qui ont une pensée bienveillante à notre endroit, qui prient pour nous. Je ne peux être reconnaissant qu’à travers ma musique. Fréquemment, je reçois des messages des inconnus qui me donnent de la force, qui me soutiennent et me remplissent d’amour et je voulais leur dire merci à travers cette mélodie. 

Des projets en vue? 

Oui, il y a beaucoup de projets en cours. Des featuring avec Lady Ponce, Aicha Kone,etc. du Lessa Groove pur, du bikutsi et un album pour l’an prochain.

Médaillé d’Or aux jeux de la francophonie à Kinshasa,  peux-tu revenir sur cette aventure depuis le début jusqu’à ta victoire? Qu’est ce que cette victoire représente pour toi? 

J’ai postulé en 2021 sans beaucoup d’espoir puis j’ai été retenu (je vous passe le report et autre). J’ai trouvé le peuple congolais très accueillant et sympathique bien qu’ humainement parlant, j’ai trouvé la compétition assez froide, l’ambiance avec les autres candidats était assez lourde (sauf les candidats de Côte d’Ivoire avec qui on se charriait). Sur le plan artistique, la compétition était rude,les talents étaient bien préparés et j’ai découvert des artistes exceptionnels. Hormis cela, j’étais très serein parce que, sans nous jeter des fleurs, nous étions beaucoup plus performants et sans grande difficulté que nous avons remporté la première place.

Cette victoire représente un véritable tremplin pour ma carrière à l’international. Après musik star, la Covid-19 a fauché tous les projets, les tournées et les collaborations ce qui a été une véritable épine pour ma carrière. J’ai dû énormément me battre par la suite pour essayer de revenir et cette victoire redonne du peps à ma carrière.  

 Un mot pour tous ces jeunes qui t’observent et te prennent en exemple.

Je voudrais leur dire d’être eux-mêmes, de rêver grand et de persévérer. Ne surtout pas laisser une personne leur dire qu’ils ne peuvent pas, ne  permettre à personne de projeter ses peurs sur eux.

Nadia Ed