Ymma : « Notre mission, c’est d’inspirer tous les enfants ».

Le projet est né du constat fait sur le manque de poupées noires sur le marché. Les enfants noirs doivent avoir des jouets qui leur ressemblent pour leur permettre de construire leur identité.

Ymma est une start-up qui a été créée par deux camerounais en 2020, Gaëtan Etoga et Yannick Nguepdjop, installés au Canada. L’entreprise est spécialisée dans la fabrication des poupées africaines. Un an après son lancement, l’évolution des activités de la marque est satisfaisante, malgré quelques difficultés auxquelles les promoteurs doivent faire face au quotidien. Jeunesse du Mboa est allé à la rencontre de Ymma, voici ce qu’il faut retenir de cette interview.

Amis d’enfance depuis le Cameroun, aujourd’hui co-fondateur d’une start-up, on peut dire que le destin de Gaëtan Etoga et celui de Yannick Nguepdjop était déjà scellé au regard de leurs parcours respectifs ?

Oui d’une certaine façon. Entre le moment où on se rencontre la première fois et aujourd’hui, on n’a pas toujours été en contact actif. Après s’être un peu perdus de vue au Cameroun, nous nous sommes retrouvés en France puis on s’est encore perdus de vue, pour finalement se rencontrer au Canada lorsque Yannick y est arrivé.

Pourquoi et comment est né le projet Ymma ?

Notre mission est simple : Inspirer les enfants. Le projet est né du constat fait sur le manque de poupées noires sur le marché. Les enfants noirs doivent avoir des jouets qui leur ressemblent pour leur permettre de construire leur identité. En plus, la vidéo du test de la poupée du Dr Kenneth Clarke nous a brisé le cœur, nous nous sommes dits qu’il était impératif que nous fassions quelque chose. Cette chose aujourd’hui s’appelle Ymma.

Alors que le monde entier est frappé par la Covid-19, vous faites quand même le choix de lancer vos activités en 2020. Pourquoi ?

Simplement parce qu’à ce moment, nous avons senti que tout était aligné pour qu’on se lance. À cause du confinement, on était coincés à la maison avec beaucoup plus de temps que d’habitude qu’il a fallu mettre à profit. Il y a également eu l’onde de choc provoquée par la mort de l’américain George Flyod et le mouvement BLM ( Black Lives Matters) qui a fait en sorte de susciter le débat, et a mis un peu plus de lumière sur ce que vivent les noirs en occident.

Un pari risqué que vous avez quand même accepté de faire. Racontez-nous un peu vos débuts dans cette aventure ?

Nous sommes toujours au début de l’aventure, cela ne fait que moins d’un an qu’elle a commencé. Nous avons bénéficié d’énormément de couvertures médiatiques, ce qui a permis au public de nous découvrir, de connaître notre histoire, ce qu’on fait et les valeurs que nous défendons.

Dans votre entreprise, vous travaillez également avec vos femmes. Quel est le rôle de chacun de vous dans cette chaîne entrepreneuriale ?

Les femmes ne sont pas officiellement impliquées, mais elles nous aident de temps en temps par exemple avec la gestion des réseaux sociaux ou encore les relations avec la presse pour ne citer que ça. Nous n’avons pas vraiment de rôles clairement définis, nous nous répartissons les tâches en fonction de nos compétences et de nos disponibilités. Il ne faut pas oublier que nous avons des employeurs.

Comment se déroule le processus de conception des poupées en amont ? 

Pour ça, nous travaillons directement avec nos fournisseurs en s’assurant que le cahier de charges soit respecté.

Quels sont les noms attribués à chacune de vos poupées et leur signification ?

Notre entreprise promeut également notre culture, le Cameroun. À travers nos produits, nous voulons faire voyager le client, lui faire vivre une expérience, c’est la raison pour laquelle nos poupées portent des noms de quartier de notre ville d’enfance, Douala au Cameroun.

Elles s’appellent :

  • Priso : qui vient de Bonapriso, un quartier de la ville de douala qui en langue « Duala » veut dire « la famille de Priso »
  • Sadi : qui vient de Bonamoussadi, un quartier de la ville de douala qui en langue « Duala » veut dire « la famille de Moussadi »
  • Béri : qui vient de Bonabéri, un quartier de la ville de douala qui en langue « Duala » veut dire « la famille de Béri »

Comment arrivez vous à manager une partie de votre équipe qui est au Cameroun, quand on sait que beaucoup de personnes en occident ont peur d’investir dans leur pays d’origine ?

Ce n’est pas évident, mais c’est un choix que nous avons fait pour participer à l’économie du pays. C’est un perpétuel apprentissage encore en rodage. Les façons de travailler sont très différentes, mais on essaie d’inculquer nos valeurs, nos standards à nos collaborateurs. C’est un long processus qui sera bénéfique à tout le monde. Nous croyons que nous pouvons y arriver.

Des hommes à la tête d’une start-up qui fabrique des poupées noires. Ça été une surprise pour les gens ? Si oui, comment arrivez-vous à surmonter ce cliché ?

Surprise ? oui. Étonnement ? oui. Mais cliché ? pas vraiment. C’est vrai que ça sort de l’ordinaire mais les gens ne s’arrêtent pas beaucoup dessus.

Comment arrivez-vous à commercialiser vos poupées (noires et métisses) dans un environnement fortement dominé par des marques qui existent depuis des années ? 

Nous sommes différents par notre histoire, les produits que nous proposons procurent une expérience, en plus nous avons un impact réel sur les communautés. C’est tout ceci qui fait notre originalité.

Vos poupées sont aussi vendues dans d’autres pays à l’instar du Cameroun ?

Pour l’instant nos poupées ne sont vendues qu’à travers notre site internet www.ymma.ca et nous offrons la livraison internationale.

Que ce soit dans la communauté africaine de la diaspora ou blanche, la marque Ymma est-elle bien reçue ?

Elle est très bien reçue parce que nous recevons beaucoup de feedback positif de nos clients ou même de personnes qui n’en sont pas forcément mais qui apprécient ce qu’on fait.

La question des discriminations raciales continue toujours d’alimenter les débats. La marque Ymma est-elle dans le prolongement du mouvement Black lives Matters ?

Prolongement ? non. Parce qu’il n’a pas fallu qu’il y ait ce mouvement pour que nous nous rendions compte qu’il y avait un manque à combler sur le marché. Mais ce mouvement a un peu plus conscientisé sur les black owned businesses.

Au-delà de cette initiative, vous vous êtes donnés une mission. C’est laquelle ?

Inspirer tous les enfants ! j’insiste bien sur TOUS. Pas seulement les enfants afro descendants.

Après presque une année d’activités, quel est le bilan que vous pouvez faire ?

Une première année satisfaisante, mais il reste encore énormément de travail pour se rendre où l’on souhaite arriver.

C’est quoi la prochaine étape ? 

Élargir notre catalogue de produits, agrandir notre communauté.

Charles Binelli

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