Malgré la crise sanitaire, ces secteurs ont tiré leur épingle du jeu

La crise sanitaire a apporté la preuve qu’au Cameroun, il est possible de produire localement. Que la ressource humaine camerounaise a du potentiel, elle a un génie créatif exceptionnel.

Selon un rapport du GICAM (Groupement Inter-patronal du Cameroun), 92% des entreprises présentes sur l’étendue du territoire ont été impactées négativement par la pandémie. Certaines entreprises ont dû réduire leurs effectifs, ou encore se séparer définitivement de leurs employés.

Pour d’autres, elles ont été dans l’obligation d’arrêter leurs activités. Cependant, malgré une situation économique à l’agonie, avec les effets qui ont suivi par la suite, certains secteurs, qu’il soit de l’informel ou pas, ont plutôt fait de bonnes affaires durant cette crise.  

Secteur informel :

Plusieurs activités liées au secteur informel ont dû fermer boutique, le temps que les choses reviennent un tout petit à la normale. Lorsque l’on sait l’impact de ses petits commerces dans le tissu social, on imagine bien la peine que certains ont eu avant d’accepter ces changements.

Mais comme dit toujours l’adage « à quelque chose malheur est bon », et on a pu le constater, car derrière la covid-19, d’autres activités génératrices de revenus ont vu le jour.

C’est le cas par exemple de la vente des masques. Après la décision du Gouvernement camerounais obligeant le port constant du masque dans les lieux publics, les tailleurs, face au déficit observé, ont sauté sur l’occasion. Dans tous les ateliers, l’heure était à la production de masse des masques à base de tissu pagne.

Et il y avait de toutes les coupes, avec les prix variant d’un tailleur à un autre. Ceux-ci oscillent entre 500 FCFA et 1000 FCFA, parfois moins même à certains endroits. À chaque coin de rue, des vendeurs de tout âge et des deux sexes battant sur le macadam en proposant à la crié pour certains un masque.

Dans cette diversité de propositions, le client n’a qu’a faire le choix sur les modèles qui lui sont proposés. Sur la toile aussi, de nombreuses personnes proposent aussi des masques avec plusieurs options ;

le client peut venir acheter sur place, ou alors il se fait livrer. Devenu un objet incontournable du quotidien, les masques font dorénavant partie des accessoires de beauté qu’on porte pour se distinguer.

Avec une population estimée à 26 390 686 au 10 avril 2020, la fabrication et la commercialisation de ces produits vendus seulement à 500 FCFA l’unité, offrent un marché d’au moins 13 milliards aux acteurs du domaine de la confection. 

Un autre domaine qui a aussi su s’adapter, c’est celui de la restauration en ligne. Ne pouvant plus recevoir leur clientèle comme avant, de peur de créer un foyer de contamination, certains restaurants se sont tournés vers la restauration en ligne.

Tous les menus sont dorénavant proposés sur les plateformes populaires ( Facebook, Twitter). En quelques semaines, certains ont vu leur chiffre d’affaire grimpé au point de se retrouver dans l’incapacité de satisfaire la demande.

C’est le cas par exemple de Madame Kansia. Il y a encore quelques temps son activité avait la peine à décoller,  aujourd’hui elle livre en moyenne  150 plats par jours dans la ville de Yaoundé.

Un succès qu’elle doit en grande partie à la vente en ligne. Son activité est tellement florissante, qu’elle a été  contrainte d’embaucher quelques jeunes pour faire face à la force demande. Et elle n’est pas seule, de nombreuses qui se sont lancées dans la vente des repas en ligne ont vu leur chiffre d’affaires s’agrandir au jour le jour. Ceci grâce aux méthodes de livraison mis en place pour satisfaire les attentes de la clientèle.   

La médecine traditionnelle n’est pas en reste. C’est peut-être l’un des grands gagnants de cette crise sanitaire. Longtemps boudée par une grande partie de la population, la médecine traditionnelle est aujourd’hui au cœur de toutes les sollicitations.

Depuis qu’on a attribué à certaines plantes des propriétés thérapeutiques qui auraient un impact sur le virus, les consultations chez les naturopathes connaissent actuellement une hausse considérable.

Pour ceux évoluant sur les espaces de fortune en pleine rue, ils proposent des décoctions à base d’écorces qui sont prêts à l’emploi, ou à composer à la maison aux familles ayant des revenus moyens. Ces derniers proposent ainsi une variété de produits qui auraient la capacité de renforcer le système immunitaire.

Les prix sont vraiment très attractifs. Ainsi, le commerce des tisanes, des thés et autres infusions vit une période de gloire jamais atteinte par le passé. Surtout la fameuse Artemisia qui est vendue à 3500 FCFA les 35 grammes. Une herbe assez adulée par certains experts du domaine. De ce qui précède, il est évident que la Covid-19 fait du bien à une catégorie de travailleurs dans le secteur informel.

Le secteur formel

La Covid-19 s’avère aussi comme une véritable donneuse d’opportunités, surtout pour les entreprises cosmétiques qui se sont lancées dans la fabrication et la commercialisation des gels hydro alcooliques et autres produits de désinfection.

Bactol (@Bactol_bio) | Twitter

C’est le cas notamment des laboratoires Biopharma qui ont saisi cette opportunité pour gagner une grande part de marché. En effet, cette entreprise a acheté la licence de Bactol pour pouvoir satisfaire la demande en gel hydro alcoolique au Cameroun.

Le service de communication de cette institut n’a pas fait de sortie sur les bénéfices qu’ils engrangent, mais le constat fait dans les rayons de supermarchés est clair : ces produits s’arrachent comme des petits pains. Plusieurs autres petites et moyennes entreprises se sont aussi lancées dans la production de ses gels, ce qui offre ainsi aux clients de faire aisément le choix sur la panoplie des marques qui sont disponibles sur les surfaces des marchés. 

Deuxièmement, un autre secteur qui connait aussi une situation favorable en cette période, c’est celui de l’industrie du textile. Les artisans ne pouvant pas satisfaire à la forte demande des populations, des entreprises comme le groupe industriel Sycar a lancé depuis le 2 avril dernier une production journalière de 5000 masques made in Cameroon.

Puis il y a aussi L’entreprise Cicam (Cotonnière Industrielle du Cameroun) qui a trouvé le moyen de se relancer à travers la fabrication des masques. Elle s’est fixée une production mensuelle de 15 million de masques, objectif encore bien loin d’être atteint car elle ne dépasse pas encore les            300 000 produits le mois. Néanmoins, la structure a trouvé le moyen de se stabiliser et de se relancer dans les affaires.

Troisièmement, l’industrie pharmaceutique camerounaise connait une de ses plus belles périodes en terme d’innovation et de commercialisation. Suite à la fermeture des frontières, et par conséquent la baisse significative de l’importation des médicaments, le pays a dû développer lui-même sa production afin de satisfaire la demande.

Effectivement, l’usine de fabrication des produits pharmaceutiques Africure Pharmaceuticals S.A a vu une augmentation de la commande des médicaments tels que les antalgiques, les antibiotiques et les antipaludéens.

En somme, la covid-19 n’a pas que des répercussions négatives sur l’économie du pays ; au contraire, elle est aussi source d’opportunités. Et au regard de nombreuses initiatives qui ont vu le jour pour faire face à cette pandémie au Cameroun, tout porte à croire que quelque chose de nouveau est en train de se préparer.

Vers une autonomisation de l’économie camerounaise

L’économie camerounaise d’avant la crise affichait une dépendance servile vis-à-vis des importations. En effet, rien que ces trois dernières années, le Cameroun y a dépensé environ 10 000 milliards FCFA, soit le double du budget de l’Etat en 2019. Alors que le Cameroun peut se passer de l’importation de plusieurs produits en renforçant tout simplement son industrialisation.

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C’est dans ce sens que le Président de la République S.E Paul Biya allait dans son discours de fin d’année 2018 lorsqu’il affirma : « j’ai souvent dit que nous sommes en situation de produire une grande partie de ce que nous importons, qu’il s’agisse de produits d’origine agricole ou industrielle. Il faudra absolument en tenir compte ». 

La crise sanitaire a apporté la preuve qu’au Cameroun, il est possible de produire localement. Que la ressource humaine camerounaise a du potentiel, elle a un génie créatif exceptionnel.

Il n’y a qu’à voir les nombreuses réalisations qui ont été faites, durant la crise pour se rendre à l’évidence. Pourtant, la valorisation du made in Cameroon ne date pas d’aujourd’hui. Seulement, beaucoup de personnes continuent encore de faire confiance aux produits qui viennent de l’extérieur. Cependant, le regard que les camerounais portent aujourd’hui sur la fabrication locale n’est plus le même. Grâce à la covid-19, on a ressenti un dynamisme des entreprises camerounaises à vouloir à tout prix montrer de quoi elles sont capables. Covid-19 ?

Charles Binelli

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